Jeune maker est content. Après un dur labeur, de longues périodes de réflexion sur le gameplay de son jeu et l'implantation de moultes scripts (mini carte, crafting et A-RPG notamment), son chef d'oeuvre est désormais une démo complète de 1h30.
- "Super", se dit-il, "Il faut que je poste mon jeu sur Oniromancie pour que tout le monde il y joue, et que je devienne famous ! "
Un upload sur Mediafire, et c'est parti, le bouzin est fièrement en topic en haut des nouveaux projets.
Jeune maker, satisfait, va se coucher dans ses draps Mickey.
Vue d'artiste.
Le lendemain matin, à 14h24, la stupéfaction est lisible sur le visage de notre héros, aucun message de nouveau fan sur son topic, qui au passage s'est retrouvé enterré sous 4 autres nouveaux jeux utilisant les mêmes scripts que lui et à l'histoire similaire.
- "Ce n'est rien", s’exclama-t-il, "Le making est mort après tout, c'est normal que personne n'ait vu mon jeu le futur Undertale du jeu amateur. Laissons le temps, beaucoup des meilleurs jeux de l'histoire ont mit du temps à se faire connaître. "
Il retourna jouer à League of Legends.
Les jours passèrent, et le désarroi prenait lentement mais sûrement place dans le cœur du jeune homme. Sous la pression des nouveaux jeux apparaissant constamment au dessus du sien, un furieux appui du bouton up fut réalisé par notre Toby Fox en herbe quelques jours auparavant. Mais rien n'y fait, aucun commentaire (mis à par CuddleFox qui a un peu joué et qui a donné quelques conseils sur ce qui n'allait pas parce qu'il est gentil).
Les larmes à l’œil, il allât déguster son petit déjeuner du jour (13h31 cette fois ci, le stress perturbait de façon évidente son sommeil).
- "Pourquoi personne ne joue à mon jeu, il est pourtant pas trop long, et plutôt sympa... Les makeurs sont-ils tous des salauds qui ne jouent pas aux jeux des autres ? "
Peu s'en doutait-il, la réponse à ses interrogations était un jeu de mot lié à la brioche chocolatée qu'il tenait dans sa main droite.
Image d'archive cette fois-ci.
Les makeurs sont une espèce assez complexe. Mais il est important de retenir un point, certes surprenant de prime abord au vu de la réputation des geeks dans la société actuelle mais qui nous est bien crucial, ils ont une vie. Certains ont un métier, d'autres des études longues, certains vont draguer des jeunes filles ou jeunes hommes au physique attrayant le soir, alors que d'autres préfèrent regarder des séries bien au calme dans leur lit, mais il existe une constante, ils n'ont pas envie d'investir de leur temps dans n'importe quel jeu amateur. Certains sont dans la communauté depuis plus de 15 ans et ils en ont vu passer des jeux, parfois des très bons, souvent des très mauvais. Après en avoir vu autant qui se ressemblent, il est normal de vouloir faire le tri, et c'est exactement ce à quoi servent les sections "nouveaux projets" et "projets avancés du forum. Et c'est exactement sur comment se distinguer sur cette sélection que le jeune maker à fauté. Son jeu était mal pitché.
Et cet article, lecteur assidu qui a réussi à ne pas décrocher de mon texte jusque là, a pour objectif de t'aider à pitcher ton jeu en te donnant quelques conseils pour te démarquer de tous ceux l'ayant fait vite fait, et ainsi décrocher l'adoration de la communauté.
Lesson 1 : Ta backstory c'est dans le jeu, pas dans la présentation
Si dans ton univers médiévalo-futuristique il y a deux empires millénaires, Gauchua et Droitim, qui s'affrontent depuis des années pour prendre le contrôle du Referindrum, le crystal situé au fin fond du volcan Creuse, créé par la déesse De Gaullia lors de la création de la planète France, c'est pas dans ta présentation qu'on souhaite le voir. De une, on retiendra jamais toutes ces informations, et de deux c'est juste lourd et inintéressant à avoir sous forme de texte. Le backstory est un élément primordial à l'élaboration d'un rpg, ceux-ci étant très très souvent axés sur l'histoire, et sa découverte, petit à petit au fur et à mesure d'une partie, est une des choses qui contribue à l'immersion et au plaisir de jouer. Nous donner toute l'histoire du jeu dans ta présentation, c'est nous couper l'envie de devoir l'apprendre à nouveau dans ton jeu.
A la place, contente-toi plutôt d'établir la direction de l'univers. Pour reprendre le même exemple, une bonne présentation aurait été:
"Bienvenue en France, un monde médiévalo-futuristique en proie à une guerre terrible au sein de laquelle vous êtes plongés ! "
C'est suffisamment court, ça fait se poser des questions (pourquoi cette guerre? ça veut dire quoi "médiévalo-futuristique?) et c'est suffisant pour cadrer l'imagination du joueur.
Même chose pour les personnages. Je me fiche de savoir que le héros Arkozy est un soldat de l'Union pour le Mouvement Populaire de Droitim ayant appris à se battre à l'épée avec son père à l'age de 4 ans et qu'il a perdu toute sa famille dans un accident de fer à repasser. L'important est ce à quoi il ressemble et que c'est un soldat. Le reste est des éléments qu'il faudra faire découvrir dans le jeu par des dialogues, flash-back, décors ou n'importe quelle autre technique d'exposition.
Extrait de la présentation de Rihura - Winds of Freedom, courte, efficace, qui ouvre des questions, un bon exemple.
Lesson 2 : Les fonctions de base de RM / Le script que tu utilises, on s'en fiche
Renomme les personnages s'il te plaît, on veut pas de héros de jeu sur VX s'appelant Ralph.
Le menu de base est bien, mais c'est pas la peine de nous le montrer si t'as rien modifié dessus.
Crois-moi, les scripts d'A-RPG on les connait, on a vu des centaines de projets avec.
MogHunter on a vu tout ce qu'il a fait balancé de manière brute dans beaucoup de projets aussi.
Ca revient à l'idée de se démarquer du lot. Tu t'en doutes, beaucoup de démos RM sont des jeux réalisés en 1 ou 2 après-midis, clairement pas assez de temps pour produire des systèmes ou idées complexes, et donc avec peu de contenu. Ils se retrouvent donc à être des amalgames de scripts et de ressources de base ou récupérées sur internet. Et ces ressources ou scripts ont tendance à être. Toujours. Les. Mêmes...
Je ne renie pas ces jeux, c'est très bien pour se faire la main sur le logiciel, de découvrir la création de jeux et se faire une idée de voir si ça c'est sympa, mais nous on n'est pas très motivés à en jouer.
Voilà exactement ce qui ne nous intéresse pas (source : screen perdu dans les tréfonds d'Oniro).
Lesson 3 : Mets en avant les décisions que tu as prises
Là on touche le point critique. Souvent, quand ils présentent leurs jeux, les gens ne font qu'énoncer le contenu du jeu, les systèmes qu'ils ont mis, les persos, l'histoire, etc. Il faut en effet présenter l'expérience de jeu, le gameplay, c'est vital, mais les makeurs ne sont pas n'importe quel public et il s'agit d'un qui a ses envies.
Nous aussi nous sommes créateurs de jeu, et on veut savoir le pourquoi du comment.
Mettre un système de survie dans le jeu est intéressant, expliquer ses raisons et comment le joueur va devoir agir en conséquence l'est encore plus. Expliquer comment les systèmes se répondent entre eux, la manière dont les choix du joueurs sont présentés, orientés, tout ça ça nous passionne. N'hésite pas à faire des graphiques pour nous expliquer tout ça aussi.
Il est possible que des membres ne soient pas d'accord avec toi et contestent tes décisions, mais ce n'est pas grave, c'est même une bonne chose ! Premièrement ça crée de la discussion et donc de l'intérêt pour ton jeu, et deuxièmement c'est l'occasion d'apprendre pour tout le monde. Il est également possible que tu arrives à convaincre tes détracteurs en leur prouvant que ton avis est pertinent pour ton jeu.
esson 4 : Des vidéos, des screens in-game, des artworks
Je te demande pas de tout avoir, je comprends que les artworks ne soient pas à la portée de tout le monde, mais il faut au moins que tu aies des éléments de 2 de ces catégories. Et c'est comme l'argent, plus t'en as mieux c'est ! (Sylvanor approuve) N'hésite pas à nous assommer de screens, les makers adorent le visuel.
Les vidéos sont privilégiées, car tout simplement elles permettent de voir le gameplay en application. Si ton jeu est bon, la vidéo fera mouche.
Surtout, ne viens pas avec des demandes d'aide pour des domaines de ton jeu. Ca n'intéresse personne. Aucun "scripteur" ne viendra t'aider à réécrire tout ce qui est déjà trouvable sur internet. Pas de zigoto viendra faire les graphismes de ton jeu à ta place. Nous avons pour la majorité d'entre nous déjà du mal à avancer sur nos jeux, on n'a pas besoin d'un autre projet pour perdre encore plus de temps.
Egalement, on ne va pas te design un système de combat. On est prêt à donner notre avis et de discuter des différents systèmes de ton jeu, mais pas les faire entièrement pour toi sous tes instructions.
Un topic qui commence par un recrutement me désintéresse immédiatement, et je doute être le seul.
Autrement dit, faites mon jeu à ma place. Pitié, stop. (source : tréfonds d'Oniro une fois de plus).
Lesson 6 : En vrac
Quelques conseils qui n'avaient pas leur place dans une lesson complète.
-Orthographe correcte : La langue française est bien belle, aucune raison de lui faire une Hannibal Lecter.
-Structure : Telle ta prof de collège, je te répète qu'il est important de construire sa présentation de manière logique. En soit, il faut que les différents éléments s'enchaînent de manière fluide. Ne parle pas d'un système de magie sans avoir évoqué le type de jeu auparavant.
-Jeux cryptiques : Ces jeux sont une exception. Cultiver le mystère fait partie de leur raison d'être, et donc souvent profitent de la présentation de leur jeu pour commencer à l'instaurer. Ils se retrouvent donc à peu en dire et à jouer avec les règles de présentation. C'est un cas très particulier, et peu de projets peuvent se le permettre.
Orange Salvifique aurait perdu de sa superbe si tous les personnages et l'univers avaient été présentés dans sa fiche du jeu
Certes nous ne sommes pas des investisseurs, il n'y a pas d'intérêt, mis à part donner envie de jouer, à chercher à nous vendre un jeu à ce point là. Mais en vérité ce que j'essaye de faire, à travers les différents articles que j'ai écrits pour Oniro, c'est de vous faire comprendre un état d'esprit apprécié dans la communauté, celui de personnes qui s'investissent dans leurs jeux. Nous sommes à une période où la maturité du making est bien passée, et l'identité des makeurs est désormais assez claire : nous sommes des créateurs de jeux amateurs, des passionnés. Et comme dans toute passion, nous aimons ce qui a montré un soin particulier à toutes ses étapes. Je ne vous demande pas de vous forcer à travailler votre jeu tous les soirs, et de le reprendre en permanence jusqu'à qu'il soit parfait. Ce que je souhaite, c'est que vous créiez votre jeu pas pour le fun, mais pour l'amour du média, et de mettre les efforts nécessaires afin de le communiquer, et cela en sortant ce qu'il y a de plus beau pour vous. Et j'espère vraiment que mes articles pourront vous aider à aller dans cette voie.